Le Maire de la ville de Bafoussam est accusé, à travers une correspondance signée par le chef supérieur Bamougoum, Mitterrand Moumbe, d’avoir remis la somme de 50.000 Fcfa (Cinquante mille francs Cfa) à chaque membre du conseil des neuf notables pour les inviter à une réunion séditieuse. Il est aussi dénoncé pour s’être opposé à l’ouverture d’un complexe scolaire construit en violation des normes de l’urbanisme. Le gouverneur de la région de l’Ouest s’implique…
Le torchon brûle entre Sa Majesté Mitterrand Moumbé, chef de 1er degré du groupement Bamougoum, et Roger Tafam, notable de cette localité et maire de la ville de Bafoussam. Indigné, ce chef traditionnel a, en date du 18 juin dernier, adressé une lettre épistolaire au patron de la ville de Bafoussam. « Dans la matinée du 17 juin 2024, vous vous êtes illustré par votre habituel comportement désobligeant à l’endroit du Roi des Bamougoum, lorsque par le canal téléphonique (un canal impropre et indigne d’un notable de votre rang), vous avez utilisé un ton emprunt d’un orgueil démesuré, tentant ainsi d’exercer une quelconque pression pour obtenir une audience à la Cour Royale Bamougoum », écrit Sa Majesté Mitterrand Moumbé.
Défiance à l’endroit de l’autorité traditionnelle
Le chef de 1er degré de Bamougoum rappelle aussi qu’en date du 04 mars 2024, il a saisi le maire de la ville pour lui signifier les difficultés rencontrées par Norbert Petou, « digne fils Bamougoum », à se faire délivrer une autorisation ministérielle d’ouverture d’un complexe scolaire à Kena sur un site à lui céder par les soins du Roi des Bamougoum. « Souvenez-vous également que par votre réponse datée du 15 mars 2024, dans un langage discourtois, vous avez rabroué votre roi en insinuant qu’en installant ce promoteur dans ledit site, le Roi des Bamougoum s’était investi à transgresser les règles d’urbanisme et pourtant ce site fait l’objet du titre foncier n°19079/Mifi délivré par voie d’immatriculation directe le 14 janvier 2022 », ajoute le Fo’o Mitterrand Moumbe. Un titre foncier donne-t-il automatiquement droit à un permis de bâtir ? Roger Tafam ne partage pas cet avis. En date du 16 mars 2024, il a écrit à madame le ministre de l’Habitat et du développement urbain pour lui indiquer que les constructions entreprises par sieur Norbert Petou n’ont pas respectées les exigences en matière d’urbanisme. Et comme il s’agit d’un projet de complexe scolaire, le maire de la ville de Bafoussam, a, en date du 31 janvier 2024, appelé l’attention du ministre des Enseignements secondaires sur le fait que ce complexe ne saurait servir à l’éducation des jeunes. Cette démarche du magistrat municipal, conforme à ses attributions contenues dans le code général portant organisation et fonctionnement des collectivités territoriales décentralisées de décembre 2019, ne plait pas au Roi des Bamougoum. Il trouve que Roger Tafam manifeste « un mépris envers l’éducation de cette jeunesse soucieuse d’une éducation polyvalente à l’effet d’affronter les défis de l’auto-emploi efficace et décent ». Le chef supérieur de 1er degré de Bamougoum parle aussi d’une trahison de son autorité et du peuple Bamougoum. Roger Tafam qui porte également la casquette de notable (Mbe Ndefoe Teuboh Tadiyack) est accusé de défiance à l’endroit de cette autorité traditionnelle. « Par ailleurs, le Roi des Bamougoum vous tient pour commanditaire d’une conspiration visant à instrumentaliser le conseil des 9 notables Bamougoum, (les dépositaires des us et coutumes Mungoum), car en date du 16 juin 2024, tous sont passés aux aveux de ce que, vous avez pris soins de charger monsieur Kengne Heribert (notable Mbe Fodjouo), de remettre à chacun des membres de ce conseil, une somme de 50.000(cinquante milles) francs Cfa représentant les frais de transport pour prendre part à une réunion prévue dans la matinée du 24 juin 2024 au domicile du notable Mbe Fodjouoh pour un projet connu de vous seul ; convoqués au palais ce même jour(16 juin 2024) chacun d’entre eux a confirmé ses aveux en remettant les 50 000 francs susmentionnés ; les 500.000 francs collectionnés en présence du Conseil Supérieur des Notables Bamougoum(représentant le corps de ce délit de trahison), ont été déchargés par votre acolyte traitre Kengne Heribert », argumente le Fo’o des Bamougoum, Moumbe Mitterrand. Joint au téléphone au moment où il était 8heures 49 en date du lundi 24 juin 2024, l’autorité traditionnelle a confirmé l’authenticité de cette correspondance et a indiqué qu’il ne souhaitait aucun commentaire. Car elle est destinée au maire de la ville de Bafoussam, Rogert Tafam, et non à la presse. Et pourtant, cette affaire semble déjà publique. Selon le chef Bamougoum, le gouverneur de la région de l’Ouest, Awa Fonka Augustine, est penché sur ce dossier. Informé de cette situation conflictuelle, Awa Fonka Augustine, a convoqué les différents protagonistes pour une réunion d’apaisement tenue, à huis clos, le lundi 24 juin dernier dans ses services. Le Maire de la ville, Roger Tafam, y était tout comme le Fo’o des Bamougoum, Mitterrand Moumbe et bien d’autres dignitaires. Au moment où nous mettions sous presse, aucune nouvelle suite à cette rencontre. Mais l’observateur reste dubitatif. Il est tenté de croire qu’au-delà d’une bataille liée à des incompréhensions sur une question d’urbanisme se dessine une guerre de positionnement politique pour le contrôle de la ville de Bafoussam d’ici l’horizon 2025.
Stéphane Mba